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Visite de la Ferme SIRLIN

Heimsbrunn, Dimanche 15 mai

Jean-Paul SIRLIN est connu pour être l’un des rares producteurs de choucroute en agriculture biodynamique, et qui dit biodynamie dit "ferme". C’est donc la ferme de M. Sirlin que nous avons visité pour comprendre comment fonctionne une ferme en biodynamie.

M. Sirlin nous reçoit à 10h00 dans sa ferme d’Heimsbrunn, et s’empresse aussitôt de distribuer son mélange pois/triticale (nous vous dirons plus loin de quoi il s’agit…) à ses vaches ! Il y a là environ 25 vaches de race montbéliarde auxquelles il donne aussi de la luzerne mélangée avec de la tactile, ou encore du trèfle. Nous évoquons ensemble le problème de la sécheresse, car ces derniers mois n’ont pas donné assez de pluie… Il se peut qu’il n’y ait que la moitié du foin disponible cet hiver… et il sera difficile d’en trouver ailleurs, car la sécheresse touche d’autres pays…et en plus il faut trouver du foin bio… !

Jean-Paul Sirlin nous donne l’historique de sa ferme, et nous fait partager ainsi son histoire familiale, car une ferme, c’est avant tout les hommes qui la composent et la font vivre ! La ferme se situe à Heimsbrunn, environ 1400 habitants. En 1970, il y a avait 12 agriculteurs au village ; en 1976 le remembrement en fait diminuer le nombre ; en 1984 les quotas laitiers font disparaitre 4 éleveurs ; en 2011 M. Sirlin est le dernier à élever des vaches ! Les obligations de mise aux normes entraînent des investissements importants et peuvent fragiliser l’équilibre souvent précaire des fermes.

En 1960, le père de Jean-Paul Sirlin reprend la ferme de son père au centre du village. Mais il ne reprend pas les choses exactement comme elles sont car dès le début il se tourne vers une agriculture biodynamique, respectueuse des hommes et de la terre. Pourquoi ? blessé pendant la guerre, mal soigné, il s’oriente vers un médecin qui va réussir à le guérir grâce à une alimentation différente et des bains thermaux. Sauvé par cette autre approche, il décide à son tour de donner aux autres quelque chose de différent, de plus généreux, et se lance dans le bio. Dans son parcours, il rencontre le fondateur de la Vie Claire, ainsi que d’autres personnes proches de la biodynamie, dont ils sont les précurseurs. Le père de Jean-Paul commence avec la choucroute : 2ha de culture, pour 27 tonnes de chou. L’affaire se développe, mais face aux délais de paiement trop longs de ses clients professionnels, il décide de passer à la vente directe. Hélas, il est faussement accusé dans un accident de la route et il sombre dans la dépression. Jean-Paul, son fils, a alors 9 ans. Quelques années plus tard, Jean-Paul obtient un BEP et un CAP de réparation de machines agricoles. En effet il ne voulait pas suivre les cours d’agriculture classiques et s’entendre dire qu’il est bon d’utiliser des pesticides et autres !!! après ses diplômes il reprend donc la ferme de son père et la rénove au fur et à mesure par ses propres moyens. Ainsi il ne fait jamais de gros emprunts, et grâce à son frère et à son oncle notamment, réussi à entretenir et à développer les bâtiments. Un des derniers investissements est le moulin à farine !

Après l’historique, Jean-Paul Sirlin évoque la différence entre le Bio et la Biodynamie. * le bio : autorise les engrais organiques, permet d’avoir une ferme sans animaux, n’encourage pas les haies, les arbres etc… et n’a pas de dynamique de groupe. * la biodynamie : lancée dans les années 20 par Rudolf Steiner, a une vision plus globale ; préconise l’élevage des animaux en même temps que les rotations des cultures, la conservation des cornes à leur taille normale sur les bêtes, encourage l’expérimentation personnelle, l’utilisation de préparats qui sont dynamisés (exemple de mélange : le « 500 » à base de corne, ou le « 501 » à base de silice). Le fumier est composté car il est plus efficace comme cela, et les préparats sont mis dans le tas de compost. Les préparats sont souvent à base de plantes médicinales : pissenlit, camomille, écorce de chêne, valériane…

Jean-Paul Sirlin évoque la figure de Maria THUN, qui a mis en place les calendriers lunaires utiles à la biodynamie d’aujourd’hui, et qui a étudié le système planétaire tout en faisant beaucoup de travaux pratiques. Hélas, le fait d’être une femme l’a desservie et elle n’a pas été prise au sérieux comme il se devrait.

Il évoque aussi le nom de M. Krust à Bernwiller, qui a lancé dans les années 1980 un groupe de réflexion sur la biodynamie en invitant des professionnels de Suisse et d’Allemagne.

Dans les années 1990 beaucoup de fermiers se sont investis comme maître de stage dans un nouveau cursus « formation en biodynamie » (qu’on trouve encore aujourd’hui au CFPP d’Obernai) et se sont perdus de vue à cause du peu de temps disponible qu’il leur restait. Les groupes de réflexion et de pratiques se sont donc un peu éteints à partir de ces années.

Nous partons ensuite nous promener pour voir les cultures de M. Sirlin. Ouf, les rayons de soleil nous réchauffent un peu ! On peut voir dans ces champs de la triticale et du pois. La triticale est un croisement de blé et de seigle. Le pois apporte l’azote nécessaire à la restructuration du sol, et il est bien tenu par la triticale qui lui sert de tuteur !

Nous arrivons sur le champ destiné au CHOU ! M. Sirlin cultive la vieille variété THURNER, et il est le seul en Alsace à le faire ! Le 1er jour, les choux sont récoltés (un jour fleur), puis sont placés dans une remorque. Le 2e jour, on effeuille les choux (enlever les feuilles sales) Le 3e jour on coupe le chou.

Nous retournons aux bâtiments pour voir la partie consacrée à la fabrication de la choucroute. Après avoir préparé les choux (voir 3 étapes ci-dessus), on peut les mettre en cuve. Il y a là 3 énormes cuves en bois. Elles peuvent contenir 7 tonnes de chou ! on y place les choux en couches avec du sel (50kg de sel de Guérande) et des aromates (aneth…). Ensuite on laisse faire la lacto-fermentation, en prenant soin de bien presser le tout grâce à des ballons remplis d’eau (ils descendront ainsi automatiquement en même temps que le niveau des choux) pendant 6 semaines à environ 22°C. Puis il n’y a plus qu’à venir acheter sa choucroute biodynamique chez M. Sirlin ou aux Sheds de Kingersheim où elle est distribuée !

Après toutes ces explications, nous commençons à avoir grand faim, et nous mangeons un pique-nique amélioré suivi de tartes succulentes et de cafés offerts par M. Sirlin. Un vrai régal !

Merci encore à Jean-Paul Sirlin pour toutes ses explications et son accueil ! Nous nous souviendrons longtemps de cette journée à la ferme !

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